Repère 2: La qualité du lien entre professionnels et bénéficiaires
1. Le respect de la singularité, fondement de l’intervention
1.1 Accueillir la personne et respecter sa singularité
Le moment de l’accueil doit être conçu pour ne pas accroître la vulnérabilité ni la dépendance : le moment de la rencontre entre la personne (et ses proches) et l’établissement est l’occasion d’un travail particulier de prise en compte de sa situation singulière.
Une présentation précise des modalités de fonctionnement de l’établissement, des différents intervenants et de leur rôle, ainsi qu’une mise en œuvre progressive et individualisée de la prise en compte sont actées.
L’objectif est ainsi de faire de ce moment de rencontre le socle d’une co-élaboration des prestations offertes suivant la situation, les attentes et les ressources propres de la personne.
1.2 Apporter une réponse adaptée aux besoins de la personne grâce à la formation et à la qualification des professionnels
Le bénéficiaire et ses proches sont en situation de devoir faire confiance à des professionnels pour apporter une réponse à leurs besoins et à leurs attentes. Ce recours s’appuie sur une information, des valeurs, une qualification et une formation des professionnels leur permettant de s’adapter aux publics accueillis, et une compétence collective et individuelle entretenue et complémentaire des ressources du bénéficiaire et de ses proches.
1.3 Formaliser le respect de la singularité de la personne grâce au contrat de séjour et au document individuel de prise en charge
La prise en compte de la situation singulière des personnes accueillies par ALBATROS 08 trouve une formalisation dans le contrat de séjour ou le document individuel de prise en charge. La formalisation et la signature de ces documents sont des occasions d’éclairer les personnes accueillies et leurs proches sur toutes les modalités de fonctionnement de l’établissement et d’instaurer une relation claire en termes de droits et d’obligations réciproques.
En fixant les modalités selon lesquelles vie individuelle et vie collective seront conciliées au sein de la structure, le règlement de fonctionnement contribue également au respect de la singularité des bénéficiaires.
1.4 Porter toute l’attention nécessaire à la nature et à l’expression de la relation affective.
Dans leur relation aux bénéficiaires, les professionnels se voient sollicités pour répondre à des besoins de nature extrêmement variée. Les réponses, pour être en adéquation avec les besoins des bénéficiaires, peuvent varier d’une réponse verbale ponctuelle à un suivi éducatif très durable, d’une présence momentanée à un accompagnement prolongé sur des années, d’un soutien passant par le langage à une forme d’accompagnement où les gestes et la visualisation jouent un rôle central.
Une réflexion collective régulière est engagée sur les formes de lien et de relations encouragées ou au contraire inacceptables, afin que le professionnel puisse toujours situer son action et ses réactions (verbales, physiques, comportementales) dans le cadre de valeurs et de missions clairement identifiées. Vécu de manière individuelle, le lien du professionnel à la personne accueillie peut ainsi être entouré de garde-fous indispensables, alimentés par les règles déontologiques des professionnels et la réflexion éthique entretenue à ALBATROS 08.
Toutes les formes que peut prendre le lien sont l’objet d’une réflexion quotidienne concrète pour les professionnels, et d’un accompagnement psychologique. Ce lien a en effet pour caractéristique d’engager le professionnel en tant que personne de manière extrêmement profonde et de mettre en jeu sa personnalité sur des registres sensiblement différents, en particulier lorsque des besoins affectifs lui sont très directement signifiés. Ceci appelle donc une possibilité de réflexion autour de la « juste distance » et de tous les gestes ou comportements qui sont susceptibles de la concrétiser.
C’est pour prévenir ce risque d’attachement trop profond et pour travailler la juste distance que les équipes des foyers d’hébergement interviennent alternativement sur chacune des trois maisonnées. C’est également à ce titre que des réunions mensuelles de réflexion autour des pratiques sont animées par les psychologues de l’établissement.
2. La vigilance concernant la sécurité physique et le sentiment de sécurité des personnes accueillies
2.1 Assurer la protection et veiller au bien-être physique des personnes accueillies
Une culture de la bientraitance ne peut intervenir que pour autant que les besoins primordiaux de sécurité des bénéficiaires soient effectivement pris en compte. Outre le respect de dispositions réglementaires, ALBATROS 08 prend toutes les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des personnes par l’identification et la prévention de tous les risques concernant spécifiquement les résidants qu’elle accueille et accompagne.
Lorsque le risque est clairement identifié, il fait l’objet d’une communication claire à l’égard de la personne accueillie, de ses proches et évidemment d’un protocole d’accompagnement à l’égard de l’ensemble des professionnels concernés.
Le bien-être physique fait l’objet d’une réflexion permanente et d’une démarche volontariste de la part des professionnels dans toutes les dimensions de l’accompagnement qui y contribuent, notamment l’attention portée au confort dans la vie quotidienne et, lorsque cela est nécessaire, la lutte contre la douleur. A ce titre, un protocole a été établi avec le médecin traitant intervenant à ALBATROS 08 pour permettre à la personne n’étant pas en mesure de verbaliser une douleur de bénéficier d’un traitement médicamenteux à base de paracétamol pendant quelques jours et d’une observation constante de ses troubles, de leur éventuelle diminution. En fonction de l’arrêt ou non de ces modifications de comportement, des examens et une investigation seront effectués afin de ne pas banaliser et passer à côté d’une pathologie ou d’un trouble physiologique.
2.2 Veiller à la communication et à l’articulation entre les professionnels
Le fonctionnement du foyer de vie ALBATROS 08 appelle une rotation de personnels fréquente auprès des bénéficiaires. Cette rotation fait l’objet d’une réflexion de l’encadrement pour être limitée, afin de ne pas déstabiliser les personnes accueillies.
Afin que cette rotation ne mette pas en péril la fiabilité de l’accompagnement des personnes, la mise en place de procédures de transmission d’informations rigoureuses est finalisée, sous une forme à la fois orale et écrite, ainsi que des moments réguliers de réflexion plus distanciée sur les formes et le devenir de cet accompagnement.
ALBATROS 08 sensibilise les intervenants à la fois à la rigueur de la transmission d’informations, et à la nécessité d’informer le bénéficiaire du contenu de l’échange dont il a été l’objet. Cette sensibilisation a pour objet de mettre les professionnels en situation de sécuriser les personnes sur le fait que leurs besoins et situation sont connus en dépit du changement d’intervenant.
A ce titre, les protocoles établis par les équipes, les besoins spécifiques des bénéficiaires, les projets personnalisés sont remis à l’ensemble des personnels éducatifs. Les personnes appelées à intervenir en remplacement bénéficient chaque fois que possible d’une ou deux journées d’intervention en binôme afin de se familiariser avec l’accompagnement personnalisé pour chaque résidant, le changement d’équipe mensuel sur les hébergements permet une première journée de passage de relai.
De plus, pour que le résidant ne perçoive pas une dépendance plus grande envers les professionnels au regard d’informations qui lui échappent, les informations concernant les équipes en poste lui sont communiquées de la manière la plus transparente possible et la plus adaptée (photographies, affichage…)
Par ailleurs, les informations concernant les bénéficiaires font l’objet, chaque fois que c’est pertinent et dans le respect du secret professionnel, d’une mutualisation afin d’améliorer la coordination des accompagnements.
2.3 Informer les personnes accueillies sur les événements institutionnels et les changements de professionnels
Les bénéficiaires sont dans leur vie quotidienne affectés de manière parfois considérable par la modification d’horaires, de fonctionnement ou de professionnels les concernant de près ou de loin, notamment suite à une réorganisation ou en période de vacances. Pour préserver le sentiment de sécurité, leur permettre de comprendre ces changements et de ne pas les interpréter de manière négative, ces modifications sont l’objet d’une communication détaillée et adaptée (pictogrammes, visualisation, affichage, plannings à disposition des familles, journal…).
Le fonctionnement ordinaire d’ALBATROS 08 s’établit le plus possible dans le respect de la parole donnée aux bénéficiaires, notamment en matière d’horaires, d’emploi du temps et d’échéances annoncés (modification des ateliers, respect des groupes et horaires, prévision et annonce des sorties exceptionnelles, informations sur les groupes, lieux, dates et emplois du temps lors des séjours…)
2.4 Être réactif aux besoins de la personne accueillie et apporter une réponse appropriée à sa demande
Le lien de confiance ne peut se perpétuer entre un bénéficiaire et des professionnels que si des réponses adéquates sont identifiées et apportées lorsque la personne ou son représentant adresse une demande. Les professionnels apportent la réponse la plus adaptée à la demande, qu’elle soit humaine, médicale, éducative, sociale…, et qu’elle appelle une intervention humaine, matérielle ou technique.
Dans le cas où une réponse adaptée ne pourrait être identifiée dans le cadre du projet, un refus motivé et une explication sont apportés à la personne, de façon à ce qu’elle ne perde pas l’envie ni la possibilité d’adresser des demandes. Un mode de communication adapté à la personne et à son degré de compréhension accompagne ce refus.
3. Un cadre institutionnel stable
3.1 Veiller à la connaissance et au respect du droit au sein de la structure
Les lois de référence du secteur social et médico-social font l’objet d’un rappel écrit et explicite ainsi que d’une appropriation régulière par les professionnels, à la fois à l’occasion d’informations et de formations permettant de revisiter les pratiques, et à l’occasion du traitement préconisé face à une situation exceptionnelle (situation de violence par exemple).
Les actes des bénéficiaires sont inscrits dans le respect du droit et aucune permissivité n’est de rigueur à l’égard des transgressions qu’ils peuvent commettre, qu’elles soient commises envers les autres bénéficiaires ou envers les professionnels : tout acte doit être pris en compte et ne doit surtout pas être banalisé. Il fait l’objet d’une réflexion collective, en présence du médecin psychiatre de l’établissement et une attitude commune en réaction est déterminée et appliquée par l’ensemble de l’équipe.
De même, le respect des règles de sécurité s’applique pour tous, dans un souci de graduation et de pédagogie. Le rappel des règles doit être particulièrement adapté dans tous les cas de violence physique ou verbale émanant de bénéficiaires qui, du fait d’une pathologie spécifique, ne peuvent en comprendre le sens ni en maîtriser la portée. Il est important ici de souligner que des personnes peuvent souffrir à la fois d’un handicap mental ou psychique et commettre des transgressions, et qu’il est recommandé dans ce cas de ne pas systématiquement les rapporter au handicap, ce qui conduirait à réduire la personne à son handicap et à renoncer à élaborer avec elle une socialisation construite.
3.2 Effectuer un rappel à la règle si nécessaire, sans glisser dans l’excès de rigidité institutionnelle
En cas de manquement au règlement de fonctionnement de la part d’un bénéficiaire, un rappel à la règle est effectué par un professionnel habilité, dans le respect des procédures prévues au sein du projet d’ALBATROS 08 et de manière adaptée à la capacité de compréhension de la personne, afin de ne pas banaliser cette transgression. Pour ce faire, dans un premier temps, le règlement construit par un groupe de résidants est adapté (pictogrammes) afin d’être compris de l’ensemble des bénéficiaires et affiché dans les différents lieux de vie. Ce règlement est ensuite remis à chaque personne accueillie sous forme d’un « permis de bonne conduite », permis à points. Le rappel à la règle est fait très régulièrement par les professionnels, affichage à l’appui, et en cas de manquement, une intervention et une réponse graduées sont effectives par le professionnel témoin du manquement, le chef de service et/ou la directrice.
Ce rappel à la règle est accompagné d’une explication et opéré par et/ou en présence du professionnel dans une recherche manifeste de maintenir la communication, pour que la solidité du cadre ne devienne pas rigidité punitive. Des voies de recours sont formalisées pour permettre à toute personne concernée de contester une décision si elle le souhaite.
Dans tous les cas, le rappel à la règle, pour ne pas porter atteinte au respect de la personne, est fait en prenant soin de ne pas induire par l’appréciation sur l’acte commis un éventuel jugement sur la personne qui l’a commise.
3.3 Intervenir en cas de violence pour contenir la personne qui l’exerce envers les autres
La violence peut au sein d’ALBATROS 08 prendre des formes très variées – physique, verbale ou psychologique, active ou passive, ponctuelle ou répétitive – et peut émaner des professionnels et des bénéficiaires.
Quelles que soient sa forme et sa gravité, toute forme de violence fera l’objet d’une intervention immédiate, de jour comme de nuit, et de manière adaptée par le professionnel présent.
L’événement fera l’objet d’un écrit puis d’une analyse distanciée dans le temps, afin d’en repérer les origines et d’en rechercher collectivement des mesures correctrices, dans une volonté de prévention et de compréhension.
3.4 Interroger les passages à l’acte violents à la lumière de la vie de l’institution et du parcours de la personne
Lorsque la violence sera produite, elle fera systématiquement l’objet d’une réflexion collective pour en comprendre les causes, qu’elles concernent le parcours du bénéficiaire ou la vie de l’institution. Cette réflexion pourra être accompagnée par le recours à un tiers, dans le cadre notamment d’une médiation. Elle pourra prendre également la forme d’une analyse des pratiques permettant aux professionnels de mieux comprendre en quoi certaines situations peuvent conduire les individus – professionnels ou bénéficiaires – à dépasser le cadre.
Dans le cadre des réflexions qui ont lieu à ce sujet, le bénéficiaire et son représentant ou le professionnel en cause aura la possibilité de s’expliquer sur les raisons de son acte.